(Dessin réalisé au primaire)

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Les charleries

Bienvenue sur mon blogue,

Ce blogue contient des souvenirs, des anecdotes, des opinions, de la fiction, des bribes d’histoire, des récréations et des documents d’archives.

Charles-É. Jean

Poèmes

# 5145             9 décembre 2019

Quand il neige

Le Québécois Albert Lozeau (1878-1924) aimait décrire la nature. Voici un de ses poèmes :

 

Quand il neige sur mon pays

De gros flocons couvrent les branches,

Et les regards sont éblouis

Par la clarté des routes blanches.

Et dans les champs ensevelis,

La terre reprend le grand somme

Qu’elle fait pour mieux nourrir l’homme,

Quand il neige sur mon pays.

 

Quand il neige sur mon pays,

On voit s’ébattre dans les rues

Les petits enfants réjouis

Par tant de splendeurs reparues.

Et ce sont des appels, des cris,

Des extases et des délires,

Des courses, des jeux et des rires,

Quand il neige sur mon pays.

 

Quand il neige sur mon pays,

C’est que tout le ciel se disperse

Sur la montagne et les toits gris

Qu’il revêt de sa claire averse,

Ou qu’une avalanche de lis

De sa pureté nous inonde…

C’est le plus beau pays du monde,

Quand il neige sur mon pays !

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# 5010             24 septembre 2019

L’heure des vaches

Blanche Lamontagne (1889-1958) est la première poète québécoise. Voici un de ses poèmes :

Elles venaient, faisant sonner leurs sabots lourds
Dans une rayonnante marche,
Ainsi que du soleil éparpillé qui marche,
Et levant leurs yeux de velours.
Voici la Noire, la Barrée,
La Rougette à la douce peau,
Et Satin, reine du troupeau,
Dont la croupe est ronde et dorée.
Viens t’en viens ! Viens t’en viens
Qué vach’ qué ! Qué vach’ qué !
Et les vaches venaient d’un pas lent et rythmé.
Elles avaient parfois de grands airs triomphants.
L’orgueil se levait-il sous leur tête vivace ?
Car elles ont leur part dans l’espoir de la race,
Les vaches dont le lait a nourri nos enfants.
Les bonnes vaches maternelles,
Les bonnes vaches à l’œil clair,
Savent-elles que ceux dont le pays est fier,
Nos filles et nos fils, seraient moins beaux sans elles.

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# 4975             3 septembre 2019

Je suis un fils déchu…

Alfred DesRochers (1901-1978) a renouvelé la poésie du terroir donnant à la nature une place prépondérante dans ses écrits. Voici un de ses poèmes :

 

Je suis un fils déchu de race surhumaine,
Race de violents, de forts, de hasardeux,
Et j’ai le mal du pays neuf, que je tiens d’eux,
Quand viennent les jours gris que septembre ramène.

 

Tout le passé brutal de ces coureurs des bois :
Chasseurs, trappeurs, scieurs de long, flotteurs de cages,
Marchands aventuriers ou travailleurs à gages,
M’ordonne d’émigrer par en haut pour cinq mois.

 

Et je rêve d’aller comme allaient les ancêtres;
J’entends pleurer en moi les grands espaces blancs,
Qu’ils parcouraient, nimbés de souffles d’ouragans,
Et j’abhorre comme eux la contrainte des maîtres.

 

Quand s’abattait sur eux l’orage des fléaux,
Ils maudissaient le val, ils maudissaient la plaine,
Ils maudissaient les loups qui les privaient de laine :
Leurs malédictions engourdissaient leurs maux.

 

Mais quand le souvenir de l’épouse lointaine
Secouait brusquement les sites devant eux,
Du revers de leur manche, ils s’essuyaient les yeux
Et leur bouche entonnait : "À la claire fontaine"…

 

Ils l’ont si bien redite aux échos des forêts,
Cette chanson naïve où le rossignol chante,
Sur la plus haute branche, une chanson touchante,
Qu’elle se mêle à mes pensers les plus secrets :

 

Si je courbe le dos sous d’invisibles charges,
Dans l’âcre brouhaha de départs oppressants,
Et si, devant l’obstacle ou le lien, je sens
Le frisson batailleur qui crispait leurs poings larges;

 

Si d’eux, qui n’ont jamais connu le désespoir,
Qui sont morts en rêvant d’asservir la nature,
Je tiens ce maladif instinct de l’aventure,
Dont je suis quelquefois tout envoûté, le soir;

 

Par nos ans sans vigueur, je suis comme le hêtre
Dont la sève a tari sans qu’il soit dépouillé,
Et c’est de désirs morts que je suis enfeuillé,
Quand je rêve d’aller comme allait mon ancêtre;

 

Mais les mots indistincts que profère ma voix
Sont encore : un rosier, une source, un branchage,
Un chêne, un rossignol parmi le clair feuillage,
Et comme au temps de mon aïeul, coureur des bois,

 

Ma joie ou ma douleur chante le paysage.

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# 4945             15 août 2019

Le Vaisseau d’or

Émile Nelligan (1879-1941) est un des plus célèbres poètes québécois. Il est né à Montréal d’un père irlandais et d’une mère canadienne-française. En 1899, il compose le sonnet que voici :

 

Ce fut un grand Vaisseau taillé dans l'or massif :

Ses mâts touchaient l'azur, sur des mers inconnues ;

La Cyprine d'amour, cheveux épars, chairs nues,

S'étalait à sa proue, au soleil excessif.

 

Mais il vint une nuit frapper le grand écueil

Dans l'Océan trompeur où chantait la Sirène,

Et le naufrage horrible inclina sa carène

Aux profondeurs du Gouffre, immuable cercueil.

 

Ce fut un Vaisseau d'Or, dont les flancs diaphanes

Révélaient des trésors que les marins profanes,

Dégoût, Haine et Névrose, entre eux ont disputé.

 

Que reste-t-il de lui dans la tempête brève ?

Qu'est devenu mon cœur, navire déserté ?

Hélas! Il a sombré dans l'abîme du Rêve !

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# 4680          9 février 2019

Temps déplorable

Il est venu.

Il s’est excusé.

J’avais tellement

l’air pressé.

 

Il est resté debout

les mains bien serrées.

 

Je lui ai signifié

que je n’avais pas le temps

de le recevoir.

 

Il s’est excusé.

Il m’a demandé

un rendez-vous.

 

J’ai sorti

mon agenda.

 

J’ai cherché

un temps libre.

 

Il est resté debout

les yeux hagards

les mains moites.

 

Il s’est épongé

le front.

Il a échappé

ses mains.

 

Il s’est excusé.

 

J’ai plongé

à nouveau

dans mon agenda.

 

Il a ouvert la bouche :

« Excusez-moi

je suis trop pressé.

Je vous écrirai. »

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# 4635          12 janvier 2019

Tendre souffle

Souffle attendri

déversoir de la vie.

 

Vie qui sourit

eden de la terre.

 

Terre qui guérit

ber en gaieté.

 

Gaieté qui virevolte

Parodie en buées.

 

Buées de rires

parade d’écrins.

 

Écrins de plaisirs

mort du diablotin

 

Diablotin en fugue

joie du firmament.

 

Firmament qui rit

cendres déboussolées.

 

(Poème écrit en 2014)

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# 4605          24 décembre 2018

Il est né

Il est né le divin enfant

À Nazareth, on croit.

Il est né le divin enfant

dans une étable.

 

Joseph et Marie sont en route

pour visiter la parenté.

Marie avance péniblement à pied.

Il fait 10 degrés Celsius.

 

Marie voit venir avec appréhension

ses premières contractions.

Ils n’ont pas de toit.

La noirceur se pointe le nez.

 

Joseph est rempli d’émotions.

Son premier enfant.

Un fils, il l’espère.

Il sait qu’il en est le père.

 

Il fait 10 degrés Celsius.

Vaut mieux ne pas accoucher dehors.

 

Une blafarde lumière passe à travers

les fenêtres d’une modeste maison.

Joseph cogne à la porte.

Un homme élégant ouvre.

« Pourriez-vous nous recevoir, de dire Joseph ?

Ma femme est sur le point de délivrer. »

 

« Entrez, de répondre l’homme.

Nous n’avons pas de place à l’étage.

J’ai une étable au sous-sol.

Trois de mes fils y couchent.

Je peux vous installer dans une crèche.

Mon âne, mon jeune bœuf, mes deux vaches,

mes trois moutons réchauffent l’étable.

Si mon coq chante au milieu de la nuit,

ce sera pour annoncer la bonne nouvelle. »

 

Il est né doucement le divin enfant

grâce à la sage-femme de la maison.

 

Il est né le divin enfant.

Le coq a réveillé la maisonnée.

 

(Poème-récit imaginaire écrit en 2018)

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# 4575          6 décembre 2018

Requiem

Si l’amour n’entoure pas

le pauvre

un écueil

fracassera

son fragile bonheur.

 

Son hivernale chemise

pâlie par un soleil de plomb

prêtera à la mer

son humeur saline.

 

Son pantalon troué

flottera

rampant

au gré des vagues.

 

Son corps usurpé

à la terre

usinera dans la mer

une piètre nourriture.

 

Si l’amour n’entoure pas

le pauvre

c’est le requin

qui l’entourera.

 

(Poème écrit en 2002)

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# 4385          4 juin 2018

Oiseau oublié

Déjà dans le hameau

l’hiver a planté sa tente.

 

Pris au dépourvu

un oiseau

aux ailes alourdies

par le verglas

tente un timide vol.

 

Ses plumes

ressemblent

aux pétales

d’une fleur violée.

 

Ses yeux

ressemblent

à des grains de sable

perdus dans un mur de glace.

 

Le hameau sympathique

retient son haleine.

 

Haletant

gémissant

l’oiseau s’égare

dans l’air gelé.

 

Happé en lui-même

il s’endort

dans une chaude vallée

concoctée par les esprits

du hameau.

 

(Poème écrit en 1995)

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# 4255           25 mars 2018

Île nouvelle

Des pavillons géants

vêtus de rameaux écaillés

dressent leurs racines éphémères

sur une île inventée.

 

Des images féeriques

sorties d’une boîte chétive

inondent la coque

de navires en partance.

 

Des sons vertigineux

tissés d’un essaim d’azur

volent sur un tapis

planté d’un feuillage volubile.

 

Des milliers d’hôtes

courent d’un pavillon cossu

à une auberge dessinée

dans l’émeraude.

 

Pendant une seconde

l’île s’assagit

d’une indigestion soudaine.

 

Pendant une seconde

l’île reprend ses ébats

trop longtemps refoulés.

 

Pendant une seconde

l’île vit dans la poussière

et le brouillard.

 

(Poème écrit en 1967 après la visite de l’Expo 67 à Montréal)

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# 4230           15 mars 2018

Plaisir effeuillé

Les feuilles de ma vie

usées

barbouillées

s’envolent

bousculées

par le vent.

 

Feuilles de floraison

vertes

épanouies.

 

Feuilles d’automne

jaunes

rouges.

 

Feuilles du matin

délurées

attachantes.

 

Feuilles du soir

épuisées

recluses.

 

Elles planent

courent

comme des faons égarés.

 

Le tapis de verdure

grisaillé

maculent les feuilles.

 

Tristes et pensives

elles s’éteignent

englouties

dans un calme feu.

 

Les limbes endormis

brûlent.

 

Le grésillement

fait bégayer les champs

gavés de pétioles.

 

(Poème écrit en 2009)

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# 4185            25 février 2018

La marguerite

Quand j’eus mastiqué

la tendre chair

de la marguerite

je la crachai

comme une insanité.

 

De mes deux pieds complices

je l’écrasai.

 

Mes entrailles

flattées de volupté

se mirent à lancer

des cris délictueux.

 

Une larve volcanique

oubliée

se mit à bouillonner

au centre de mon écorce.

 

Elle se fraya une voie

autour d’un cratère ruisselant.

 

Un fleuve d’herbes

de cailloux

de grains de sable

glissa son chemin

à travers mes sens.

 

La fournaise de l’écœurement

explosa

et me réduisit

en un crachat de marguerite.

 

(Poème écrit en 2003)

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# 4085            16 janvier 2018

Mèches grises

La mèche

a tourné au gris.

 

Elle décourage

les cheveux noirs

circonspects.

 

La mèche

a disparu.

 

Elle a entraîné

les cheveux noirs

suspects.

 

Le crâne inquiet

hisse ses nouvelles couleurs

calcinées

au mât du plateau.

 

Le désert

vit

sous une tuque

accolée au génie.

 

(Poème écrit en 1998)

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# 4040            8 décembre 2017

Sérénité

Quand l’obscurité

plonge ses premières lueurs

au milieu de stupidités

je me cache

sous une feuille de tilleul.

 

Mes yeux vitrés

se surprennent

à cracher

des étoiles verdoyantes.

 

Et là

en face du brouillard

je regarde les étoiles

qui se querellent

s’excitent

se lancent du venin.

 

Les nébuleuses atterrées

invoquent

ma sérénité

au prix de mille sérénades.

 

Mes yeux vitrés

percent la vitre.

 

Ils se surprennent

à avaler

les étoiles verdoyantes

et à éclater

d’un orgueil bien mystique.

 

(Poème écrit en 1988)

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# 4015            28 novembre 2017

Ménage outré

Un clocher majestueux

raille

sa cloche névrosée.

 

Une cloche esseulée

injurie

son grelot apeuré.

 

Sur la route

un convoi

tranquillement avance.

 

Un cahot importun

Se montre le nez.

 

Le ménage outré

sème

une bourrasque

fâchée.

 

Le ménage éclate

en mille morceaux.

 

Un barreau fonceur

frappe le grelot esseulé.

 

Le grelot fortifié

frappe la cloche.

 

La cloche gifle

le clocher.

 

Les lamelles du ménage

épousent

les parcelles du clocher.

 

(Poème écrit en 1964)

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# 3985            16 novembre 2017

Lacet du lynx

Un animal mièvre

aux yeux argentés

se cache

près d’un arbre nu.

 

Les feuilles brunies

intriguent

le vent craintif.

 

Un lacet fourchu

se mêle

aux racines de l’arbre.

 

Une poudre argentée

colore

les poils tremblants.

 

Un énorme bloc d’argent

prend forme

près de l’arbre sournois.

 

Des guiches sensuelles

habillent

l’animal amoureux

et l’arbre enfourché.

 

Le lacet habile

tend une embûche.

 

Pendant que la poudre argentée

atteint l’œil du lynx

le lacet

se noue.

 

La bourrasque dénouée

se répand

en mille épines engainantes.

 

Sous l’arbre contrit

le lynx s’est évanoui.

 

(Poème écrit en  1988)

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# 3955             4 novembre 2017

Quiétude

Dans ma prison

j’entends des sons

d’une fraîcheur virginale.

 

Mes oreilles se repaissent

mes yeux s’écarquillent

mon cerveau se réveille.

 

Les montagnes

parées d’ailes fleuries

frappent les murs

du caveau.

 

La terre martelée

par le choc

tremble de frayeur.

 

Les fragiles sons

à peine voilés

caressent le tympan.

 

Au bout du vestibule

les sons s’éteignent

dans la quiétude.

 

(Poème écrit en 1998)

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# 3920               21 octobre 2017

Friselis

Aujourd’hui

j’ai en moi

le bonheur.

 

Un tendre friselis

envahit tout mon être.

 

Les pétales du cœur

sont gonflés par l’amour.

 

Aujourd’hui

je chante

le bonheur.

 

Aux rivages lointains

mon cœur court s’épanouir.

 

J’ai appris à voler

Là-haut vers le bonheur.

 

(Poème écrit en 2012)

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# 3875               3 octobre 2017

Rêve

J’ai rêvé

que j’étais un oiseau

et qu’un précieux fil

me reliait

à la terre.

 

Fil invisible

il était.

 

Fil invisible

sans odeur

 

Le fil s’est étiré

et s’est effilé.

 

Il a fait

le tour du monde.

 

En passant

il a englouti l’oiseau.

 

Il l’a empaillé

comme une balle

de laine.

 

Je suis tombé

dans le néant.

 

(Poème écrit en 2004)

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# 3850               23 septembre 2017

Empreintes

Sur le sable

j’ai écrit un poème.

Des pas d’une sentinelle

l’ont éparpillé.

 

Dans ma main

j’ai écrit un poème.

Ma baignade précoce

l’a effacé.

 

Sur les nuages

j’ai écrit un poème.

Le vent a soufflé

et a tout emporté.

 

Dans mon cœur

j’ai écrit un poème.

Mais mon cœur

a cessé de battre.

 

(Poème écrit en 2007)

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# 3815                7 septembre 2017

Tout le monde est égal

Celui qui répand des fausses nouvelles

mérite autant d’attention qu’un expert.

Oui, tout le monde est égal.

 

Les gouvernements cachent des informations.

Celui qui veut savoir est un curieux.

Oui, tout le monde est égal.

 

Le migrant qui entre au pays illégalement

a autant de droits que celui qui le fait légalement.

Oui, tout le monde est égal.

 

Les gouvernements favorisent l’immigration.

Celui qui s’interroge là-dessus est intolérant.

Oui, tout le monde est égal.

 

Abolissons immédiatement les frontières.

J’accepte que des gens s’installent dans ma cour.

Oui, tout le monde est égal.

 

Les Québécois veulent conserver leurs valeurs.

Ils sont racistes et xénophobes.

Oui, tout le monde est égal.

 

À vouloir donner exactement les mêmes droits à tous,

on affaiblit et ostracise la majorité.

Oui, tout le monde est égal.

 

À bien y penser, tout le monde est égal.

Toutefois, il y en a qui sont plus égaux que d’autres.

(Poème écrit en 2017)

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# 3720                4 juin 2017

Décor de pluie

Les rues de la ville

bourdonnent.

 

Le soleil affaibli

flatte de ses rayons

les trottoirs noircis

par une pluie subite.

 

Les rues de la ville

gazouillent.

 

Le vent craintif

pourchasse

une pluie de grêle.

 

Le gazouillis des rues

s’affadit.

 

Le bourdonnement de la pluie

divague.

 

Les fleurs

prisonnières du déluge

consacrent leur fraîcheur

aux pieds traînants

des marcheurs.

 

Les rues de la ville

murmurent.

 

Les fleurs essoufflées

cessent

leur gazouillis.

 

Le soleil noirci

minimise

sa faiblesse.

 

Seule la pluie

cinglante

bourdonne

dans les rues de la ville.

 

(Poème écrit en 1999)

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# 3650                6 mai 2017

Abscisse

Visages curieux

dévisagent

mon échec pantelant.

 

Yeux en abscisse

s’agrandissent.

 

Cils s’allongent

pour cacher

ma paupière humide.

 

Timide larme

sonne l’alarme

s’écoule

lente

indifférente.

 

Une cohue

afflue

ensemence

relance

relents terreux.

 

À même les fibres

de ma chair

un lit

se creuse.

 

Dans ce lit

je me couche

rumine

dégouline

échecs

varech.

 

(Poème écrit en 1997)

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# 3595                 12 avril 2017

 

On honhonne

Bon !

Je suis con.

C’est un don,

Loin de l’éon.

 

Comme le font

Les gonds,

Je goûte à l’ion.

J’en perds mon jonc.

 

C’est long

De gravir un mont.

Non !

Je traverse le pont.

 

Je n’ai pas un rond.

J’entends un son

Toujours sur le même ton

Ils s’en vont.

 

On dirait que je suis zonzon.

 

(Poème écrit en 2017)

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# 3530                 17 mars 2017

 

Quel est cet homme ?

C’est un homme à la chevelure orange

Qui se donne l’air d’un archange.

 

Les uns le disent déséquilibré mental

Juché sur son piédestal.

 

Les autres le disent fêlé

Comme le serait un vase écervelé.

 

Les uns le disent mêlé

Tout comme un fuseau désarticulé.

 

Les autres le disent brouillon

Pris dans un tourbillon.

 

Notre homme est un fin renard

Avide de traquenards.

 

Quand il se sent piégé,

Il ne prend pas congé.

 

Il attaque sur un autre plan

En ne ménageant pas ses élans.

 

Il cache sa malignité

Sous son instabilité.

 

Il sait très bien ce qu’il fait

Et même ce qu’il défait.

 

Il joue un rôle maléfique

Dans un décor médiatique.

 

Bref, il est de cette race

Dont on voudrait perdre la trace.

 

(Poème écrit en 2017)

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# 3465                 19 février 2017

 

Tout en moi

Elle est là.

Elle me suit pas à pas.

Elle m’enlace

et ne me lâche pas.

 

Parfois, elle s’en va.

Elle revient tout le temps

avec plus d’amertume

ou avec plus de douceur

 

Elle est là

au creux de ma vie.

Elle réfléchit comme un miroir.

Elle s’épanouit comme un arbre sain.

 

Parfois, elle vit un film.

Elle perd doucement l’intrigue.

Elle savoure les images,

mais ne plie pas l’échine.

 

Elle est là

ma solitude.

 

(Poème écrit en 2016)

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# 3390                 20 janvier 2017

 

Réjouissons-nous!

Le poème qui suit a été composé par ma sœur Suzanne Jean.

 

Sous nos pas cadencés

Que ce jour nous soit prêté

Pour nous donner la main

Et répandre la semence du cœur         

Au genre humain!

 

Marchons vers l’Année nouvelle

En distribuant joie, paix et santé!

Sous cette terre de liberté!

 

L’esprit des temps a fui

Rejoint ce que la voix nous dit :

Réjouissons-nous!

Comme l’écho joyeux

De ce cri fraternel!

 

Ce nom qui fait qu’on aime

Comme une saveur de miel

Pour chanter et embellir le ciel!

 

Buvons notre coupe toujours la même

Sous le secret de l’onde

Aux convives d’un festin éternel

Pour rendre les gens heureux

À tous les peuples du monde!

                       

L’humanité sous cet arc-en-ciel

Rejaillit ce souffle de vie paternel

En ce jour de bonheur!

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# 3345                 2 janvier 2017

 

La borne de vie

Je publie avec plaisir un poème de Georgette Renaud.

Mon quotidien, j’en perds le fil
C’est pire à la retraite
Les saisons se faufilent
Je vis au pifomètre

Stop! Ce n’est pas trop tard
J’ai trouvé ma borne de vie
Face à la nature par hasard
Ce fut l’accalmie

Quelques minutes chaque jour
Me connecter à ma propre borne
Les effets sont sans détour
L’émerveillement me transporte

Il me suffit d’arrêter le temps
Entendre penser mon âme
Cette paix intérieure envoûtante
Ma vie, ma « mer » se calme.

 (grenaud 2016)

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# 3270                 3 décembre 2016

 

Un incident mystérieux

J’étais par terre.

Quand quelqu’un marcha sur moi,

Mon cœur arrêta de battre.

 

Quelques minutes plus tard,

je reçus un violent coup de pied.

Je faillis perdre le souffle.

 

Je me mis à réfléchir

sur le chemin que j’avais suivi

pour me rendre jusqu’ici.

 

J’avais été une fois utile.

On m’avait jeté à la rue

comme un vil rebut.

 

Quelques minutes plus tard,

Une brise matinale s’éleva

et m’envoya en l’air.

 

Je contournai les poteaux de rue.

Je valsai sur les trottoirs.

Je ne voyais plus rien.

 

Finalement, j’échouai

sur un arbre majestueux

qui m’accueillit à bras fermés.

 

J’essayai d’amadouer l’arbre.

Il ne voulut pas me lâcher.

Il avait trouvé un supplicié.

 

J’étais maintenant dans les airs

me balançant de gauche à droite.

J’avais peur de tomber au sol.

 

Aujourd’hui, je suis encore là.

Il n’y a pas de vent.

J’oscille doucement.

 

J’ai toujours peur,

Je retiens mes gémissements.

Personne ne veut me décrocher.

 

Qui suis-je ?

Un sac de plastique.

 

(Poème écrit en 2016)

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# 3220                 13 novembre 2016

 

Vide

Vie, amour

paix, sérénité

 

Calme impassible

Trou béant

Indicible horreur

Aliment de la faim

 

Mot symbolique

mot absurde

mot rêveur

mot absent.

 

Au contraire

Plénitude

Universalité

Abondance

Passion

 

Vide.

Vie sans D

Comme dans distraction.

 

(Poème écrit en 2011)

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# 3165                 22 octobre 2016

 

Gazouillis

Les trottoirs

gazouillent.

Les rues de la ville

bourdonnent.

 

Le vent hargneux

bouscule les trottoirs.

L’ouragan pernicieux

confisque les rues.

 

Le gazouillis des trottoirs

s’affadit.

Le bourdonnement des rues

s’endort.

 

Les petites fleurs

transpercent le macadam

et avalent la pluie.

 

Les petites fleurs

courent sur les trottoirs

et bousculent les marcheurs.

 

Les pieds traînants

s’empêtrent

dans une purée

qui gazouille.

 

(Poème écrit en 1984)

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# 3120                 4 octobre 2016

 

Un grand-père fatigué

Dernièrement, j’ai reçu un texte écrit par un homme de 75 ans qui signait Un  grand-père indigné. Il se disait fatigué de… et de… On connaît la litanie de ceux qui perçoivent négativement tout ce qui bouge dans la société. Il n’y a pas de gris. Voici le poème que j’ai composé à titre de réponse :

 

Pauvre homme ! qui a écrit ce pamphlet.

Il porte en lui-même un dur boulet.

Perdu dans une série d’avalanches,

Il doit passer ses nuits blanches

À broyer des pensées noires

Qui s’incrustent dans sa mémoire.

 

Pauvre homme ! qui a écrit ce pamphlet.

Il porte en lui-même un dur boulet.

J’ai beaucoup de peine pour lui.

Il ne voit pas le soleil qui luit.

Il ne perçoit que les ténèbres

Qui rendent sa vie funèbre.

 

Pauvre homme ! qui a écrit ce pamphlet.

Il porte en lui-même un dur boulet.

J’aimerais lui souffler à l’oreille

Qu’il faut voir la vie comme merveille

Plutôt que d’accrocher ses pieds

Dans toutes les fleurs fanées.

(Poème écrit en 2016)

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# 3050                 6 septembre 2016

 

Désir

À l’automne 1974, j’ai offert à Gabriel April de lui composer des textes de chansons. Il a accepté. Il était alors directeur de la pastorale à l’école Paul-Hubert et donnait à l’occasion des récitals. Voici une des chansons pour laquelle il a écrit la musique :

 

Refrain

Pendant plusieurs jours

j’ai désiré l’amour

Pendant plusieurs cœurs

j’ai vécu la douleur.

 

Couplets

I

J’ai parcouru les champs

J’ai trouvé l’ouragan

J’ai voltigé en fleurs

J’ai mordu la fraîcheur.

 

II

J’ai sondé au détour

le cœur de mes amours

J’ai poussé des volets

timidement muets.

 

III

J’ai volé sur la bouche

des baisers si farouches

J’ai épuisé mes yeux

dans de cruels adieux.

 

IV

J’ai coupé la verdure

J’ai souillé mon armure

J’ai frôlé le bonheur

J’ai récolté la peur.

 

V

J’ai dirigé mes yeux

vers un vide peureux

J’ai ralenti mes pas

et frôlé le trépas.

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# 3010                 21 août 2016

 

Lutte

Seul

en un fol univers

mystifié

déchiqueté

je médite.

 

Une poudrerie

grisaillée

gèle

en cette aube nouvelle

les relents de mon rêve.

 

Mes doigts

graves

inquiets

tracent

une piste sauvage.

 

Une bouffée de brise

étouffe

ma main.

 

Ma poitrine désaxée

éclate de fureur

et chasse

toute haleine traîtresse.

 

(Poème écrit en 1982)

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# 2990                 27 juillet 2016

 

Refrains

Ah ! modeste vie

au regard inquiet

chasse de moi

tout visage pensif

tout regard écervelé.

 

Enseigne-moi

tes détours si épanouis

tes refrains si flatteurs.

 

Désigne-moi

d'un franc doigté

tes cahots harmonieux.

 

Ah ! si j’étais toi.

Je tournerais

des rouages délicats.

 

Je volerais

les amours fanées.

Je croquerais

les pâturages verts.

Je cacherais

les messages amoureux.

 

Ah ! si modeste vie

éloigne-toi de moi.

 

Je veux voler

les amours fanées

Je veux croquer

les pâturages verts.

 

Je veux cacher

les messages amoureux

pour te perdre

sous ceux-ci.

 

(Poème écrit en 1967)

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# 2945                 8 juillet 2016

Palmarès

Je partirai un jour

vers un pays nouveau.

 

J’amènerai ma guitare

et mes chansons.

 

Là, je chanterai le muguet

et le chrysanthème.

 

Là, j’écrirai dans le roc

mon pudique nom.

 

Là, j’inscrirai au palmarès

mes exploits inégalés.

 

Mais ce jour

où est-il ?

 

Devrais-je le calfeutrer

du limon de mon être ?

 

Devrais-je le pétrir

du tissu de ma douleur ?

 

Devrais-je le semer

dans un coin de la forêt ?

 

Devrais-je l’arracher

du trognon de ma vie ?

 

Et ce jour, où est-il ?

Perdu au fond du néant

ou serti dans un chaton

égaré pour toujours ?

 

(Poème écrit en 1967)

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# 2910                 25 juin 2016

Tourbillon

Déjà

s’envole

mon poème

Battant de l’aile

perdant son gouvernail.

 

À peine est-il sculpté

qu’il s’éparpille

aux quatre coins

de l’horizon.

 

Devrais-je attendre

pour le pondre

qu’il immortalise

son auteur ?

 

Devrais-je attendre

qu’il vole là-haut

de ses propres ailes ?

 

Devrais-je attendre

qu’il amortisse

ma douleur ?

 

Ne t’éloigne pas

mon poème.

 

Étale tes refrains

azurés.

 

Exalte ta mélodie

céleste.

 

Demeure

mon poème.

 

Ne quitte pas mon sein.

Vogue sur mes lèvres.

Tourbillonne dans mon cœur.

 

(Poème écrit en 2006)

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# 2850            1er juin 2016

Pollution

Notre univers

tourne à l’envers

sens dessus

sens dessous

sans dessein.

 

Les hommes

se bousculent

se déchirent

comme de vrais étourdis.

 

Devant les yeux

un voile coloré

cache

de tristes parricides.

 

Sous leur écorce de poussière

ils construisent

des catafalques

pour les autres hommes.

 

Sous leur croûte encrassée

ils construisent

des pièges

pour les autres hommes.

 

Dans leur petite tête

ils construisent

de grands paradis

où coule le miel

de leur pollution.

 

(Poème écrit en 2005)

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# 2810            15 mai 2016

Moustique

Une mer affolée

frappe ses vagues

au rivage vagabond.

 

Les grains de sable enfouis

projettent tout haut

leur ridicule espoir.

 

Le varech pétillant

endort

la marée capiteuse.

 

Sur l’eau meurtrière

nage un minable moustique.

Le vent effleure

son abdomen fleuri.

Le soleil jaunit

ses pétales ailés.

 

Les cailloux de la berge

tressent une forteresse

blindée

d’une passerelle accueillante.

 

Le moustique confiant

enjambe le pont.

 

Derrière lui

la forteresse resserre

ses murs

et emprisonne

le naïf voyageur.

 

(Poème écrit en 1986)

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# 2760           18 avril 2016

Rouge

Je suis rouge de colère

rouge d’ennui

rouge de timidité.

 

Je cherche une étoile rouge

plus filante qu’une autre.

 

Je cherche une gloire rouge

plus douloureuse qu’une autre.

 

Je cherche une rose rouge

plus menue qu’une autre.

 

Je cherche un calvaire rouge

plus subtil qu’un autre.

 

Je suis rouge du sang

qui a coulé

en un carnage d’hécatombe.

 

Je suis rouge d’une vie

qui coule

en une volupté éphémère.

 

Je suis rouge

à broyer du noir

et d’être mis à blanc.

 

(Poème écrit en 1992)

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# 2695              23 mars 2016

Macadam

Au pied de cette colline

où autrefois la verdure

était maître des lieux

s’élèvent aujourd’hui

des maisons bien rangées

mais vides de vie

et vides d’espoir.

 

Avec la complicité

de l’homme envahisseur

un macadam

froid et rugueux

y étend ses tentacules.

 

Des grains de sable

à l’allure de moquerie

affichent

leur titre de conquête

dans les parois des cœurs.

 

Des pierres concassées

s’agglutinent

comme pour se moquer

de la machine

qui les a créées.

 

Toute tentative de vie

est pétrifiée.

 

Tout espoir de liberté

est encadré

dans des actions

standardisées

robotisées.

 

(Poème écrit en 1978)

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# 2655              26 février 2016

Gel

Dans la neige effeuillée

une vagabonde chanson

virevolte.

 

Son rythme

couleur de roulis

gigue

parmi les babioles

de la mare.

 

Son pouls blasé

chevauche

se glisse

sous les glaciers.

 

Son aiguille gelée

se débat

dans un cauchemar

de maquis.

 

Ses attraits morcelés

s’évaporent

dans les limbes hautains.

 

Dans la neige effeuillée

dans les feuilles enneigées

une vagabonde chanson

vague

d’un manège

à nul autre pareil.

 

(Poème écrit en 2007)

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# 2600             4 février 2016

Combat

Dans la nature endormie

règne

une stupeur exaspérante.

 

Mon âme persécutée

livre un combat

stupide.

 

Mes sens en détresse

torpillent dans la nuit

des rafales sournoises.

 

Mon corps tout entier

baigne

dans une mare

verdâtre

puante.

 

Pas un arbre

n’ose cacher de ses feuilles

mon cadavre morcelé.

 

Mes ongles

Mes doigts

Mes dents

foisonnent

en aval du pré.

 

Ma chair parfumée

éparpille

ses sensibles relents.

 

Mes yeux

figés par le mépris

oscillent

à la surface de l’étang.

 

(Poème écrit en 1969)

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# 2555             25 novembre 2015

Fuite

Il n’est pas heure de mourir

et pourtant mon cœur ploie

sous les fardeaux accablants.

 

Il n’est pas minute de sourire

et pourtant mes yeux s’écarquillent

sous les huées de l’encens étouffé.

 

Il n’est pas seconde de penser

et pourtant mon âme s’égare

en un paradis forcené.

 

Plutôt que de me reprocher

mes fredaines oubliées

ne vaut-il pas mieux

amadouer le temps ?

 

Je pourrais mourir

sans crainte de pétrir

la misère.

 

Je pourrais sourire

sans crainte d’ankyloser

ma patience.

 

Je pourrais penser

sans crainte de craindre

des insanités.

 

Je pourrais même

si le destin le veut

jouer avec la mort

pour qu’elle ne fasse

qu’effleurer mon épaule.

 

(Poème écrit en 1993)

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# 2505              13 octobre 2015

De feu en feu

Un feu ardent

brûle dans mon âme.

 

Un voile épais

tapissé de souffrances

s’est brisé

comme autrefois

le voile du temple.

 

Une lumière brillante

a tamisé mes yeux.

 

Des rayons ardents

ont plongé

dans l’obscurité profonde.

 

Comme un vent

plein d’énergie

ce feu court

partout.

 

Sa veine

ne s’éteint pas.

 

Les années fuient

rongées

par le feu du temps.

 

Le cœur se brise

rongé

par le feu de l’amour.

 

Le feu darde mon âme

de ses brûlants rayons

comme un feu

qui a vieilli dans les ruines.

 

(Poème écrit en 1993)

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# 2455              12 septembre 2015

Univers nu

Je me sens tout gelé.

Mes membres grelottent.

 

Les cristaux de neige

bloquent mes oreilles

ma bouche

mon nombril.

 

Aucun fil

ne me rattache plus

à l’univers nu.

 

Où suis-je ?

Peut-être suis-je

en train de vivre

une autre dimension ?

 

Peut-être suis-je

de mes dents d’ivoire

en train de mordre

la tige effilée

qui me retient à la vie ?

 

Peut-être suis-je

en train de mâchouiller

le long fil d’acier

que j’ai tissé jusqu’ici ?

 

Peut-être suis-je

en train de couper

le fil qui retient

mon bateau

dans un port bourgeois ?

 

Peut-être suis-je

en train de ne pas être ?

 

(Poème écrit en 1999)

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# 2405              7 août 2015

Fille de joie

Lèvres maculées

figure grimée

yeux corsetés

elle marche

au milieu de la foule.

 

Les passants

la dévisagent

la fixent.

 

Les gisants admirent

ses cuisses veloutées

remplies de volupté.

 

Déculottée

traînée dans la boue

piétinée

elle marche quand même

écrasant

de ses genoux dégainés

les regards trop fardés.

 

Elle marche

effleurant de son épaule

cuirassée

les paroles farfelues.

 

(Poème écrit en 2005)

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# 2360              27 juillet 2015

En larmes

Sur le chemin

je cours.

 

Des murs

je dégringole.

 

Mes jambes

flageolent.

 

Mon cœur

palpite.

 

Mes yeux

s’écarquillent.

 

Je cours

sur le chemin.

 

Ma tête

ploie.

 

Mes yeux

éclaboussent

des larmes anémiques.

 

Un chêne

gâté par les ans

se moque

de mes ardeurs.

 

La chaussée humide

m’enlise

dans un nuage de boue.

 

Je tombe

sur le chemin.

 

Mes yeux se ferment

mon cœur s’arrête

mes jambes fuient.

 

(Poème écrit en 1996)

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# 2310              3 juillet  2015

Exécution

Au milieu du cénacle

près d’une table timide

un disciple lève

son regard de pierre.

 

Dans un coin

un moine soumis

crache des grognements

sur une note étrange.

 

Le disciple épouvanté

baisse la tête

baise la joue

de son voisin.

 

Le moine complice

tire de sa bure

le cordon

de la potence.

 

Plus personne n’ose

respirer.

 

La trappe bascule

la fosse s’élargit.

 

Tête première

pieds derrière.

 

Le reclus

embrasse le sol.

 

Une foule proclame

cette profanation.

 

(Poème écrit en 1981)

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# 2260              23 juin 2015

Hommage

Un jour

je chanterai

sur ma lyre désaxée

ton visage mal famé.

 

Dans ma boîte à outils

je cacherai tes yeux

sertis dans des prunelles

plus chétives que belles.

 

Je donnerai aux gueux

ton sourire triste.

 

J’engloutirai sans honte

tes lèvres

avides de vengeance.

 

J’éloignerai

ton front caverneux

et je me noierai

dans tes larmes confuses.

 

(Poème écrit en 1967)

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# 2220              15 juin 2015

Lèpre

Le sang pointe.

La bouche échappe

ses lèvres morcelées.

 

Le menton court

sous les tumeurs

dirigées par les doigts.

 

Une plaie géante

contaminée

se réveille.

 

Sans espoir

l’œil morcelé

accueille la gangrène.

 

Sans galoches

les pieds

pétrissent la glu

pénétrée

d’un sang verdâtre.

 

La plaie se plaît

de tourner au vert

envers et contre

la rigole infecte qui

détruit doucement la nature.

 

(Poème écrit en 1997)

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# 2175              6 juin 2015

Artisane

Le dos voûté

les rides creusées par les ans

le sourire en attente

une vieille femme

tresse de ses doigts menus

des tapis de bonheur.

 

Elle glisse le crochet

de fil en fil

jusqu’au fil prophétique.

 

Le long cordon tressé

se cherche un chemin

à travers le tissu

de la vie.

 

Les brindilles misent

un espoir inquiet.

 

Le métier frappe.

Ses gonds gondolent

se déchaînent.

 

Le fil enchaîne

et forme une longue chaîne

tissée et retissée

sous le halo

de l’incertain.

 

(Poème écrit en 1987)

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# 2135             29 mai 2015

Jalousie

Dans un coin

dénudé de montagnes

serpente

un ruisselet confiant.

 

La nature souriante

étale un cachet mystérieux.

 

Pas un bruit

pas un cri

la nature crie en silence.

 

Le vent

se ballade doucement.

 

Le soleil

jette un nuage pâle.

 

Les arbres jalousent

l’apparente candeur.

 

Les ombres de la forêt

tentent

une dernière escapade.

 

Le ruisselet a peur.

Il craint

le vide

le calme trompeur.

 

Il se recroqueville lentement.

Il replie son liquide serein.

 

Le liquide

tourne au visqueux

et dessine

une énorme montagne.

 

(Poème écrit en 1999)

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# 2090             20 mai 2015

Duel

Le macadam

grouille.

 

Protozoaires affamés

se décortiquent entre eux.

 

L’herbe voisine

prête sa tige névrosée

aux bêtes marines.

 

Parasols herbacés

croisent

leurs chapeaux

en des duels ardents.

 

Même l’estoc

jouit

d’un prestige cellulaire.

 

Gantelets

casques

cuirasses

cottes de maille

gisent pêle-mêle

autour de l’étang

carnassier.

 

(Poème écrit en 1989)

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# 2055             5 mai 2015

Entaille

Bercé par les souvenirs du passé

l’aïeul ferme ses yeux meurtris.

 

Là-haut

dans un champ tranquille

une frêle charrue bouleverse

la terre nourricière.

 

Un lourd percheron

engourdi par l’âge

renâcle à son labeur.

 

Le harnais frémissant

ralentit.

 

Le coutre tranchant

se blottit sous la plaie.

 

Le soc meurtrier

retourne la cicatrice.

 

Les lourds mancherons

grisaillés

suivent.

 

Le laboureur pleure

le destin de la terre.

 

La terre sourit

à cette compassion.

 

(Poème écrit en 1975)

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# 2020             28 avril 2015

Fourmilière

Sur mon chemin

j’ai vu une fourmilière

qui n’est pas celle

des hommes égoïstes.

 

De laborieuses fourmis

sans un brin de contestation

y construisent leur logis.

 

Des œufs en pain

recouvrent les cellules.

 

Toute la colonie

travaille à l’unisson.

 

Tout à coup

les voix s’affaiblissent

et s’éteignent.

 

La fourmilière

dort.

 

Demain

le labeur reprendra

sans un brin

de contestation.

 

Seul raisonne

autour de la fourmilière

le battement de l’absurde.

 

(Poème écrit en 1992)

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# 1985             21 avril 2015

Plumes

Des ennemis

me mordent

au derrière.

 

Comme le chêne

je plie

mais ne rompt pas.

 

Je pastiche mes chaînes

mais les déteste.

 

Je galvaude ma vertu

mais ne lambrisse pas

mes sens délurés

 

Une fourmi mal chaussée

s’empare

de ma fourrière.

 

Je grimpe

sur le hamac.

 

Je sème

une couverture.

 

J’étire les oreillers

pour m’en faire

des plumes.

 

Je me couvre

de ces plumes

qui empoisonnent

mes ennemis.

 

(Poème écrit en 1981)

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# 1945             13 avril 2015

Faim

Un frisson d’amertume

me coule dans le dos.

 

Désabusé

écoeuré

je me jette dans ses bras.

 

Le cirque de la lune

affadit

ma vigueur incertaine.

 

La faim

comme une affamée

grisaille ma fadeur.

 

Un peu de pain

un peu de vin

dehors la faim.

 

Dans ses bras

je m’enlace

dehors la faim.

 

Dans ses bras

je me repais

dehors la faim.

 

La musique

des intestins

s’éteint.

 

(Poème écrit en 1967)

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# 1900             4 avril 2015

Un conflit

Le lac mystérieux

issu au hasard des bouleaux

serpente

au milieu des clameurs.

 

Sur ses bords

un cèdre

plusieurs fois centenaire

penche la tête

et encense de ses rameaux

les tendres violettes

et les herbes d’escorte.

 

Plus loin

un sapin

chétif et mal épineux

courbe sa monture

vers le colosse.

 

Sa pâture est sèche

comme une ardoise.

Une image glaireuse

y apparaît sous la nausée

de la licorne.

 

Le sapin s’agenouille.

Son mirage est brouillé

par la réputation du vieux.

 

(Poème écrit en 1986)

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# 1860             27 mars 2015

Oh, belle tempête !

Voici un poème écrit par Fernand Thibault :

 

Dans notre mémoire déficiente

nous avions oublié ton existence

 

Mère Nature t'a enfin libérée

désentravée de tes liens

 

tel un enragé en crise

vents, tourbillons

et bourrasques ont tenu en laisse

une population impuissante

devant un pouvoir dont tu abuses

il nous semble

 

Le ciel gris de la nuit

de qui se dégage une nuée de flocons blancs

recouvre le sol, les chemins, les rivières

 

retourne dans ton nid, dans l'oubli

le doux rayon du soleil

sous la voute azur à l'infini

bienfait de Mère Nature

nous assurera

la tranquillité d'esprit

pour les jours à venir

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# 1825             20 mars 2015

Fanal attendri

La princesse

de mon empire

voltige doucement

sous le fanal

de la lampe attendrie.

 

Ses ailes

se dessèchent.

 

Son bourdonnement

éclate.

 

Ses antennes

déclinent.

 

Sous le halo

la lampe tinte.

 

La princesse

gémit.

 

Son hamac

se découd.

 

Son froc de soie

se déchire.

 

La princesse

de mon empire

prend feu

brutalement.

 

(Poème écrit en 1990)

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# 1785             12 mars 2015

Nostalgie

J’aurais dû vivre

il y a un siècle

près du soc bourlinguant

tout près de la terre sauvage

non loin des marécages fiévreux.

 

J’aurais dû vivre

Il y a un siècle

dans ces forêts vierges

tout près du cri des oiseaux

non loin des pissenlits envahissants.

 

J’aurais dû vivre

il y a un siècle

au milieu des ruines de l’espoir

tout près des temples de la joie

non loin des colonnades rustiques.

 

J’aurais pu tailler mon tombeau

dans la verdure

à même la coque de l’escargot.

 

Puis aujourd’hui

je me reposerais

dans les jardins oubliés.

 

(Poème écrit en 2005)

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# 1750             5 mars 2015

Crépuscule matinal

Fernand Thibault m’a fait parvenir un poème de son crû. C’est en revenant sur son expérience de 30 ans au service d’Air Canada qu’il a eu l’idée de ce texte.

 

Soleil levant

couchant de la nuit

dernière goutte de rosée séchée au vent

au cœur de l'amaryllis

l'abeille valse au-dessus des champs

aspirant le pistil fleuri

soûlée du pollen enivrant

exaltée des parfums jaillis

amène les sucres lénifiants

à la ruche blanchie

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# 1705             24 février 2015

Midi de la vie

Le soleil déjà haut

clame à tout l’univers

son radieux sourire.

 

La lune exténuée

d’une course mensongère

s’accroche au firmament.

 

Les étoiles capiteuses

guerroient

sous la flambée des armures.

 

Sur un chemin innocent

je marche.

 

Ma tête touche

à l’azur des cieux.

Mes pieds touchent

aux tombes fleuries.

 

Au détour du chemin

je cache mes pieds meurtris

dans un tombeau perdu

et je lègue

au soleil, à la lune et aux étoiles

ma tête fleurie.

 

(Poème écrit en 1998)

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# 1665             16 février 2015

Falaise

Les fibres de ma chair

s’effilochent.

 

Mon pied

glisse.

 

Ma tête fracasse

une roche égarée.

 

Ma ceinture

montée d’une large boucle

s’accroche

à une frêle tige.

 

D’un bond

mes pieds

frappent

l’axe de la falaise.

 

Ma ceinture de cuir

s’étire

en une lame de tan.

 

Les anneaux affolés

tissent

de frêles ardillons.

 

Toute mon armature

éclate

ne laissant

qu’un ardillon

dans l’écorce du chêne.

 

(Poème écrit en 1967)

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# 1620             7 février 2015

Trace

Je suis de cette race

dont on pourrait un jour

perdre la trace.

 

J’erre dans ce désert

et personne

ne me rattrape.

 

Je rêve d’une terre

si fertile

si féconde

qu’elle mettrait au monde

des planètes allumées.

 

Je rêve d’un paradis

planté dans un champ de mil

qui tresserait les désaccords

en un panier de pain.

 

Je rêve d’une espérance

explosant à mille lieues

qui me propulserait

loin des discordes.

 

Je rêve d’un rêve

qui est inquiet de cette race

dont on pourrait un jour

perdre la trace.

 

(Poème écrit en 2011)

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# 1580             30 janvier 2015

Scandale

Je gambade

comme un homme ivre.

 

La levure nourricière

suit les veines roturières.

 

Le cerveau attardé

ploie sous la nausée.

 

Je gambade

tombe

et me relève.

 

J’habite les fossés cancéreux.

Je visite les champs dénudés

et me repais

de ce scandale humoral.

 

Je cours

et tombe dans une bière close.

Puis je m’enlise

au milieu de la levure.

 

Là j’étouffe de vivre.

 

(Poème écrit en 1983)

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# 1545             23 janvier 2015

Feu d’artifice

Ma tête

est un feu d’artifice.

 

Mes idées

sillonnent les ondes célestes.

 

Des particules esseulées

plongent

dans la boue câline.

 

Des spectateurs surpris

s’accrochent

aux éclairs de feu.

 

Mon estomac stigmatisé

se cambre

se révolte.

 

Il bloque

les canaux odorants.

 

Il endort

les grenailles ternies.

 

Mes idées explosent

comme des bolides

de poudre à canon.

 

Mes idées

se cachent

sous le terreau

et s’endorment

d’un désespoir englouti.

 

(Poème écrit en 2001)

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